Discours de Jean Hilgers, président du CA

EVENTS

Rentrée académique 2023-2024

Jean Hilgers

Je vous souhaite la bienvenue, à l’occasion de cette rentrée académique qui, après de longues années d’attente, nous mène enfin à une Université fusionnée, avec un ancrage au Centre de Bruxelles. Bienvenue aux collègues de l’USLB qui viennent de nous rejoindre. Merci à elles et eux, de nous accueillir Rue du Marais, à deux pas de la Grand place, entre le Botanique et le Palais royal.

Nous avons voulu cette fusion ; ce fut un long processus… nous y voici enfin, et je ne pense pas trahir la communauté en disant que ses membres – dont je suis- , se réjouissent de la voir enfin sur les rails. Une immense énergie a été déployée, des 2 cotés, pour harmoniser les procédures, les méthodes de travail, le traitement des données, dans le respect du schéma directeur et de la concertation sociale. Ce n’est pas fini, mais un bout de chemin est déjà accompli.

Ce rapprochement s’inscrit dans la logique multisites poursuivie par notre Université depuis pas mal d’années déjà ,mais en accélère le processus. Et cette dynamique ne s’arrête pas à Bruxelles.

J’évoquais l’an dernier la perspective de voir notre université renforcer son implantation à Charleroi dans le cadre d’un partenariat avec la haute école Louvain en Hainaut (HeLHa). Cette ambition devrait aujourd’hui se concrétiser, notamment grâce à l’obtention des Fonds Européens (FEDER et FSE) requis pour financer non seulement notre implantation, mais également la réalisation de nombreux projets de recherche et de formation, en alternance ou au bénéfice d’adultes en reprise d’études.  Il s’inscrit en outre dans la création d’un véritable site Universitaire de U Charleroi Métropole.

Ces présences renforcées à Bruxelles et Charleroi devraient aider notre université à relever bien des défis au cours des prochaines années. En particulier , celui d’un enseignement universitaire dont les contours se transforment profondément.

L’université doit, tout d’abord, être constamment préoccupée par l’adéquation entre les formations qu’elle propose et les nouveaux besoins qui émergent à vitesse accélérée. Non seulement des besoins de formations initiales, mais aussi, et de plus en plus, des besoins de formations continues. On le sait, l’acquisition et l’actualisation de compétences tout au long de la vie constituent une des clés de la construction d’une société moins fracturée. Ces besoins d’enseignement sont donc tant des nécessités de formation longue et structurée, que des acquis à satisfaire en des temps plus courts et de manière plus agile.

L’université est aussi un lieu où doivent s’expérimenter de nouvelles formes d’apprentissage et, à cet égard, de  nouveaux programmes  s’ouvrent cette année, conçus pour que les étudiants soient formés en alternance à l’université et en milieu professionnel. C’est une véritable occasion d’apprendre autrement. Par ailleurs, la collaboration qui s’instaure avec plusieurs hautes écoles pour mieux former, dès aujourd’hui, les enseignants de demain, concrétise aussi une nouvelle manière de répondre aux besoins d’une formation plus complète et plus poussée des enseignants de l’enseignement obligatoire.

Enfin,l’université européenne Circle U. dont l’UCLouvain est co-fondatrice, est également un formidable terrain d’expérimentations très concrètes dans le domaine des nouvelles formes d’apprentissage, plus particulièrement en matière de démocratie, de santé et de climat.

Parallèlement, les compétences à acquérir évoluent aussi. On pense naturellement aux compétences thématiques ,par exemple autour de la nutrition, des neurosciences ou encore de la cybersécurité. Mais il y aussi les compétences plus transversales. On peut penser aux Enseignements nécessaires pour embrasser les problématiques du développement durable, de l’égalité, de la diversité et de l’inclusion, de l’intégrité , aux compétences numériques ou encore à l’apprentissage de la démarche scientifique ainsi que du travail collaboratif.

Cet enseignement , l’université doit le faire en continuant à cultiver la dimension « universaliste » du savoir et de l’instruction- admirablement théorisée par feu le professeur Nuccio Ordine, ancien DHC qui nous rappelle qu’aucun métier ne peut être exercé, en conscience, sans subordonner l’acquisition de compétences techniques à une formation culturelle plus vaste. En cela, le rôle des universités consiste aussi à encourager les étudiants – et les enseignants- à cultiver librement leur esprit, leur créativité et leur curiosité, dans le but de contribuer au « bien commun ».

Nous devons aussi prendre conscience de la plus grande hétérogénéité de la population étudiante , pour répondre à ses besoins spécifiques de formation et d’accompagnement. Nous devons pouvoir continuer à  proposer des parcours structurés, adaptés à différents profils, parce que tout le monde ne s’inscrit pas à l’université au même moment et avec le même bagage. Nos étudiants, jeunes ou un peu moins jeunes, ont des parcours de vie variés. L’UCLouvain fait beaucoup d’efforts pour les soutenir dans leur démarche d’apprentissage.

Il est aussi de la responsabilité de l’université d’enthousiasmer les étudiants et les étudiantes et de nourrir leur curiosité. L’enseignement universitaire est un enseignement basé sur la recherche. Continuons de le dire aux étudiants. Partageons avec eux le résultat des recherches. Montrons-leur aussi la richesse de l’interdisciplinarité. A l’heure où les intelligences artificielles se développent, où les menaces sur les débats démocratiques sont réalité, un renforcement de ces dimensions dans nos programmes constitue un bon élément de réponse.  Je pense aussi fondamental qu’un dialogue permanent s’intensifie entre les enseignants et les étudiants, notamment pour contextualiser ce qu’ils apprennent, pour débattre avec eux, confronter des idées et développer leur capacité d’analyse.

Pour tout cela, la poursuite du refinancement structurel des universités reste une absolue nécessité. Nos sites doivent être des lieux d’apprentissage, de travail collaboratif et de développement personnel. Tous doivent pouvoir y accéder facilement, y trouver des espaces conviviaux, adaptés et équipés, bref s’y sentir bien. La stratégie de développement de campus durables est en marche à l’UCLouvain, mais elle ne peut se faire au rythme espéré dans le contexte budgétaire étriqué dans lequel nous vivons.

Un refinancement structurel est aussi un enjeu majeur si nous voulons accroître de manière stable et durable le taux d’encadrement de nos étudiants. Un enseignement de qualité requiert un encadrement académique, scientifique et administratif suffisant. La massification que l’on observe de manière évidente dans certaines filières conduit à une situation devenue critique pour la qualité de la formation et pour le bien-être du personnel enseignant et administratif. En 15 ans, le nombre d’étudiants a progressé de 63% alors que leur financement a augmenté à prix constants de 18%. Il y a des limites au ‘toujours plus sans accroissement des moyens’.

Ce risque est tout aussi réel dans le domaine de la recherche.

Nonobstant les défis budgétaires colossaux auxquels la Fédération Wallonie-Bruxelles et les Régions auront à faire face au cours de la prochaine législature, l’investissement dans la recherche ne peut en aucun cas servir de variable d’ajustement aux exercices d’assainissement des finances publiques, comme il l’a été trop souvent dans le passé, au risque de sacrifier les capacités d’innovation et de progrès dans notre pays. A ce stade, le message a été visiblement bien compris.

Il faut en effet saluer l’effort réalisé par la  Fédération WB et la  Région Wallonne dans le financement de la recherche ces derniers mois. Citons par exemple, en matière de recherche fondamentale stratégique, le refinancement de Welbio dans le domaine des sciences biomédicales et la création de Wel-T dans le domaine des sciences de l’ingénieur, la physique et la chimie. Ces deux programmes d’excellence sont désormais regroupés au sein du WEL-Research Institute, où nos chercheurs prennent une place prépondérante puisque 25 des 51 chercheurs financés par le WEL-Research Institute sont affiliés à l’UCLouvain. LeFNRS de son côté a apporté sa contribution au financement des programmes de recherche en sciences humaines, avec WelChange

La Région Wallonne a également pris conscience de l’importance des équipements de pointe en finançant des plateformes technologiques interuniversitaires, dans le domaine de la chimie verte et de l’espace, par exemple.

Toutes ces initiatives vont clairement dans le bon sens, mais elles resteront vaines si leur financement n’est pas poursuivi dans la durée. L’inquiétude des chercheurs se fait croissante à l’approche d’une nouvelle législature qui s’annonce budgétairement délicate et ce, d’autant plus que ces financements ont été majoritairement rendus possibles par un plan de relance qui, par définition, n’est pas pérenne. Il sera donc vital dans les mois qui viennent, non seulement de préserver le financement de la recherche, mais surtout de créer des marges si l’on veut que nos Régions  conservent leurs atouts dans un contexte de plus en plus compétitif. 

Le gouvernement fédéral est également un acteur de premier plan en matière de financement de la recherche. On ne le sait que trop peu.  Les mécanismes de dispense du précompte pour les chercheurs représentent une ressource importante pour les universités. Par ailleurs, Il n’est pas inutile de rappeler que, constitutionnellement, le pouvoir fédéral conserve la mission de soutenir la recherche dans tous les domaines où il est compétent. Les universités, et singulièrement l’UCLouvain, ont un rôle majeur à jouer dans des domaines tels que le climat, l’espace, ainsi que tous les thématiques en lien avec les instituts scientifiques fédéraux à travers les programmes de recherche soutenus par Belspo.

Enfin, la recherche à l’UCLouvain ne peut pas se concevoir sans son insertion active dans un contexte à la fois de collaborations et de compétition internationales. Le programme cadre de l’Union Européenne, Horizon Europe a démarré en 2021 Et son champ d’application vient de s’élargir avec la participation du Royaume Uni. Les chercheurs de l’UCLouvain ont bien pris la mesure des opportunités que cela représente et se sont investis largement dans le montage de projets individuels ou collaboratifs avec le soutien de l’administration de la recherche. Les résultats ne se sont pas fait attendre puisqu’à ce jour, une cinquantaine de projets ont déjà été sélectionnés pour un budget de plus de 31 millions d’Euros, rien que cette année, soit près de 45% du budget obtenu par les universités de la FWB.

Il importe maintenant que le prochain programme cadre, qui débutera en 2027, soit adapté à aux ambitions, tant au niveau de la hauteur du budget qu’au niveau des modalités d’application et de sélection. Ce futur programme cadre se prépare aujourd’hui dans les couloirs de la commission européenne et grâce à sa participation active dans des réseaux tels que The Guild et l’European University Association (EUA),dont notre Recteur a rejoint récemment le Conseil , la voix de l’UCLouvain s’exprime et notre université est en première ligne pour construire et anticiper ce prochain programme cadre.

En lien direct avec les questions d’enseignement et de recherche, mais également parce qu’il est dans son ADN d’être tourné vers l’intérêt des générations futures, l’UCLouvain a choisi de traduire résolument son engagement en termes de durabilité dans son plan « Transition »,que j’évoquais il y a deux ans: une vision ambitieuse, 32 objectifs bien identifiés, 91 actions précises,  articulées autour de 3 axes : enseigner la durabilité, soutenir les démarches de recherches pour mieux comprendre les leviers de la transition, et faire évoluer les campus à la hauteur des défis de la durabilité.

La stratégie est en marche avec des indicateurs plutôt encourageants. Grâce à l’implication de la communauté universitaire, ce sont aujourd'hui plus de 80 %  des actions qui sont en cours de réalisation ou déjà terminées, ceci explique, au moins en partie que l’UCLouvain se place aujourd’hui au premier rang des universités belges dans le classement du Times Higher Education « THE Impact » assortie d’une progression de 46 places par rapport à 2022. Avec des réalisations prometteuses :

A ce jour, 20 commissions de programmes de bachelier se sont engagées dans un processus d’intégration des enjeux de développement durable et de la transition dans les cours. Plus de 200 cours sont déjà orientés vers les objectifs du développement durable. L’ambition ne s’arrêtera pas là.

Un autre volet essentiel dans ce contexte est la nécessaire rénovation du parc de logement étudiant et la rénovation prioritaire des bâtiments académiques à faible efficacité énergétique pour tendre vers la neutralité carbone en 2035.Notre université consacre depuis plus de 10 ans des moyens financiers substantiels pour améliorer la performance énergétique de ses bâtiments. On a décidé d’accélérer le pas. Un cadre budgétaire et un plan d’investissement innovants ont été présentés par l’Administratrice Générale au comité d’investissement avec des moyens complémentaires importants pour s’inscrire dans cette stratégie de ‘transition ‘ de l’université. Les défis, à cet égard, sont colossaux, en ce compris de capacité d’exécution technique et humaine,notamment dans un marché de la construction sous tension.

Mais l’ambition est claire. Elle est de faire de notre université un véritable « Laboratoire ouvert de la transition » où enseignement, recherche et les investissements dans nos campus  sont pleinement articulés pour nous engager  face à ce défi.

Toutes ces ambitions, mesdames et messieurs, ne sont possibles que grâce à une implication sans faille de notre communauté : enseignants ,chercheurs, mais également membres de notre personnel.

Nos équipes restent très motivées dans ce contexte. On a pu le constater à de très nombreuses reprises. Merci à elles.

Mais on doit bien reconnaître que le bien-être au travail n’est pas toujours optimal.

  • Certains postes sont et restent difficiles à pourvoir.  C’est une réalité de plus en plus prégnante sur le marché du travail mais cela ne nous épargne pas et cela concerne un nombre croissant de profils.    
  • Et sans doute en partie en lien avec cela, la pression est forte sur de nombreuses équipes, occasionnant parfois des arrêts de travail pour surcharge, maladie ou « burn out ».
  • L’Université a pris la mesure de cela et lancé dans le cadre de son Plan H 600 toute une série de mesures assez complètes et cohérentes visant à nous permettre, ensemble, d’améliorer la qualité de vie et les conditions de travail des 6.000 membres du personnel. 

C’est aussi dans cet esprit que l’UCLouvain a notamment travaillé à l’amélioration de son plan « respect », dont le champ d’application est extrêmement large ,destiné à lutter efficacement contre toutes les formes de harcèlement en son sein.

C’est dans ce contexte que nous accueillons favorablement les recommandations du Rapport du Comité d’experts en la matière présidé par la Prof. Françoise Tulkens. Des propositions de ce rapport ont déjà été mises en œuvre et de nombreuses autres devront l’être prochainement,   dans le respect de la législation et de la concertation sociale. Ce sera une des priorités de l’année à venir.

Cette année sera également une année d’élection rectorale. C'est toujours un moment important pour l’Université, tant pour sa démocratie interne, son débat d’idées, mais aussi son orientation stratégique future. Notre  souhait à tous est que les débats soient riches, intéressants, passionnés et suivis par le plus grand nombre, mais soient également  caractérisé  par un climat de collégialité et de respect.  Nous avons toujours beaucoup à apprendre des confrontations d’idées et lorsqu’elles sont exprimées dans un tel contexte, l’Université en sort alors par le haut.

Mesdames et Messieurs, comme vous pouvez le constater, les ambitions ne manquent pas pour l’année académique qui s’ouvre. Elle s’amorce cette année dans un contexte très heureux, celui de notre rapprochement avec l’Université St Louis, qui nous conforte beaucoup ,car si nous ne travaillons pas toujours de la même façon, nous avons à cet égard beaucoup de choses à apprendre les uns des autres , nous poursuivons les mêmes objectifs et ensemble on sera plus fort pour les atteindre, dans une logique d’ouverture et de collaboration. La fédération Wallonie-Bruxelles est suffisamment grande que pour caresser de belles ambitions pour son enseignement supérieur ,mais trop petite que pour le faire de façon fragmentée ou concurrente. C’est dans cet esprit de coopération et de partenariats que l’UCLouvain se développe , tant dans sa fédération qu’au niveau international. Et pour réaliser tout cela, nous aurons besoin de notre communauté. Votre enthousiasme, votre expertise, votre détermination , votre engagement, votre sens de la collaboration, votre attachement à cette université , seront plus que jamais nécessaire.   Je vous souhaite une excellente année académique.